10-Les Soirs de Pleine Lune
Voici l’histoire de mon premier Amour avec un grand A
Vocabulaire
galant : prévenant
attentionné : gentil, attentif
une vague : une onde
un flot : une masse liquide
un brin : une petite partie fine
bavard : qui parle beaucoup
perspicace : avisé, clairvoyant
débordant.e : rempli d'un sentiment, exalté
mijoter : faire cuire à petit feu
la perle rare : difficile à trouver
daltonien : personne qui a un trouble de la vision des couleurs, notamment le vert et le rouge
6ème : niveau d'école pour les élèves de 11 ans
la rentrée : le premier jour de retour à l'école après les vacances
conçu : fabriqué
bouclé : frisé, qui forme des boucles
être à l'aise : se sentir confortable
4ème : niveau d'école pour les élèves de 15 ans
la filière euro : classe spécial avec des cours d'histoire/géo en langue européenne (ici espagnol)
trainer : passer du temps
un pote : un ami
un campement : une installation pour camper
la pleine lune : moment où on voit le disque de lune entier
un loup-garou : un être mi-homme mi-loup qui apparait la nuit
le fixe : le téléphone de la maison
décrocher : prendre un appel, répondre au téléphone
la circonférence : la distance autour
bafouiller : parler en hésitant, bégayer
1ère : niveau d'école pour élèves de 16 ans
la récrée (récréation) : la pause entre des cours
un slow : une danse lente entre partenaires
crever les yeux : évident, flagrant, clair
sortir ensemble : être en couple
intriguer : questionner
cesser : stopper
l'Amour platonique : L'Amour intellectuel, sans contact physique
une blague : une plaisanterie
chouette : cool, sympa, gentil, fun
un défis : un challenge
une mauviette : une personne lâche, peu courageuse
la cour : l'extérieur d'une école, entouré de bâtiments et où les élèves font la pause
un casier : un endroit fermé où poser les affaires personnelles
le préau : la partie couverte de la cour
un piou : un bisou sur la bouche
Transcription
Les carreaux de mon cœur, je vous ai dit qui yen avaient 4, les trois premiers dont je vous ai parlé c’était des crushs. Là je vais vous parler de mon premier amour, Amour avec un grand A. Pur, beau, innocent, qui a commencé par une amitié sincère et complice.
[Bienvenue sur le podcast : La Vie d'Alix]
Prenez un garçon galant, attentionné et respectueux
Faites-y fondre une vague de simplicité
Pour obtenir un flot d’ironie, mélangez avec un brin d’humour
Emplissez le plat avec une louche d’incorrigible bavard
Révélant un esprit joueur, curieux, observateur,
Critique, juste, et perspicace
Remuez le tout sous un rayon de soleil
Résonnera alors à vos oreilles un rire contagieux et apparaitront des yeux bleu ciel d’été
Reflétant une joie débordante
Ajoutez à ceci des boucles craquantes, un petit air timide, puis une cuillerée de rare sérieux
Pour finir, saupoudrez d’un sourire charmeur
Mijoter à feu doux pendant deux longues années, et avec patience,
Découvrez la perle rare que cache cet original daltonien.
Je lui avais écrit ce poème l’été de mes 16 ans.
La première fois que je l’ai vu, c’était 5 ans avant. Je me rappelle exactement ce moment-là. On était en 6ème. On avait 11 ans. C’était la rentrée. Tout le monde était nouveau. Personne ne connaissait personne. La prof nous a demandé d’où on venait, si on était né à Angers. Je me souviens très bien de ce qu’il a dit, et ça m’avait fait rire : J’ai été conçu à Paris et je suis né à Angers. On était pas proche à ce moment-là. Je le trouvais drôle, et j’aimais ces cheveux bouclés. Il avait l’air très à l’aise. Il respirait la joie de vivre. Il n’était pas comme tout le monde. Il était spontané et il avait l’air de se moquer du regard des autres. On est devenu amis deux ans plus tard... Par chance, on s’est retrouvé côte à côte en classe de 4eme pendant assez longtemps pour apprendre à se connaitre. Si vous avez écouté l’épisode 8 vous le connaissez un peu déjà. Aurélien, celui avec qui je m’amusais à compter les euh du prof. Comme on était en filière euro, on s’est suivi aussi en 3eme, puis en 2nde, au lycée. On trainait de plus en plus ensemble. On faisait du théâtre le samedi matin. Ça nous a rapproché. A la maison je parlais tout le temps de lui : « Aurélien si et Aurélien ça… » Personne disait rien mais tout le monde avait très bien compris. A mes 15 ans, je l’ai invité à ma fête d’anniversaire avec d’autres fille et un de ces potes que j’aimais bien. Pour le fun, on avait installé un campement dans le jardin afin que tout le monde puisse passer la nuit. Ce jour-là, c’était la pleine lune et il était effrayé à l’idée de dormir dans la tente. Il disait que des loups garous sortaient les soirs de pleine lune. Depuis, je vous jure qu’à chaque fois que je vois une pleine lune je pense à lui et aux loups-garous, et je ris en moi-même. Alors on était comme des meilleurs amis, parfois on s’appelait le soir pour rien. A l’époque on avait pas de téléphone portable, alors fallait appeler sur le fixe, et c’est les parents qui décrochaient. Un soir, il a appelé en disant qu’il avait besoin de mon aide pour connaitre la circonférence de la lune pour le cours de physique. On avait pas d’ordi non plus, en tout cas pas accès à internet en illimité. Alors j’ai pris le dictionnaire et j’ai commencé à tourner les pages, jusqu’à ce que je comprenne que la circonférence de la lune était une excuse pour me parler. J’étais timide à l’époque, et je sais plus ce que j’ai bafouillé mais j’étais trop contente qu’il m’appelle juste pour entendre ma voix. On passait de plus en plus de temps ensemble. En première on était plus dans la même classe, alors à chaque récré je le cherchais. C’était mon rayon de soleil. On était trop timide pour s’embrasser, ni même se donner la main. Le soir de mes 15 ans, Margaux avait fait exprès de mettre un slow pour que je danse avec lui. On était souvent ensemble et ça crevait les yeux qu’on s’aimait sincèrement. J’ai entendu des élèves qui faisaient partie de la troupe de théâtre du lycée parler de nous un jour. Yen a un qui disait « Tu crois qu’ils sortent ensemble ? », et l’autre qui a répondu « Ben oui, ils sont ensemble, c’est juste qu’ils s’embrassent pas. » Ça les intriguait. On était probablement le seul couple de tout le lycée à se comporter comme ça. On a commencé à s’écrire des lettres d’amour. J’avais mis une heure à lui écrire «je t’aime» en toutes les langues, en cherchant sur google traduction. Te amo, Jag alskar dig. Wo ai ni…. C’était beau. Je n’ai jamais cessé de l’aimer, et même 10 ans après, je rêve souvent qu’on a 15 ans et qu’on se retrouve, qu’on explore des mondes ensemble. Plus tard, j’ai entendu parler de l’amour platonique, et j’ai réalisé que c’était ce que j’avais vécu. Mais sur le moment, je réfléchissais pas trop, j’étais heureuse ainsi. Être avec lui, lui parler, l’écouter, rire à ses blagues, c’était tout ce que je voulais. Nan, j’avoue, j’avais aussi envie de l’embrasser. Et Margaux, qui était une chouette amie, m’a lancé ce défi un jour. C’était l’anniversaire d’Aurélien. Elle m’a dit : « Tu dois l’embrasser le jour de son anniversaire, sinon ça veut dire que t’es une mauviette. » J’avais pas envie que Margaux me traite de mauviette, alors ce jour-là, j’ai attendu qu’on soit seul dans la cour, on était prêt des casiers, sous le préau. Je lui ai dit : j’ai quelque chose pour toi, ferme les yeux. Il a fermé les yeux, j’ai respiré profondément, je me suis avancé et j’ai déposé ma bouche sur la sienne, très doucement. Le piou le plus mémorable de toute mon existence.