7- carreaux de mon cœur

Qui sont-ils ? Et pourquoi ont-ils tous les yeux bleus ?

Vocabulaire

  • avoir un faible pour : être attiré par

  • un carreau : plaque de verre d'une fenêtre

  • une vitre : plaque ou carreau de verre

  • voir à travers : voir ce qu'il y a derrière

  • une bordure : un cadre

  • immaculé : qui n'a pas la moindre tache ou qui est d'une blancheur absolue

  • piquer : percer

  • le 2e de la classe : 2e au classement des résultats des examens ou des tests à l'école

  • la concurrence : la compétition

  • si seulement : pourvu que

  • mignon : joli

  • une admiratrice : une personne qui admire une autre

  • CP, CE1, CE2, CM1, CM2 : niveau de l'école élémentaire

  • collège : école qui vient après l'école primaire, pour les élèves de 11 à 15 ans

  • gratuit : sans frais, qui ne nécessite pas de payer

  • un établissement : un ensemble éducatif organisé qui réunit plusieurs classes, une institution

  • un quartier : une partie de la ville

  • délimité : avec des limites

  • un bahut : un collège ou un lycée

  • une banlieue populaire : un quartier situé à la périphérie de la ville, dont les habitants connaissent des difficultés économiques et sociales

  • craquer : flancher, céder, cesser une activité à cause d'une défaillance physique ou psychologique

  • être en arrêt : être en congé (souvent maladie)

  • un défilé : succession continue de gens

  • un suppléant : un remplaçant

  • le brevet des collèges : examen passé à la fin du collège

  • un atout : un avantage

  • genre : comme

  • une dérogation : une autorisation exceptionnelle

  • tout le tralala : tout le reste

  • au grand dam : au grand désavantage de, au grand dépit de

  • un désistement : un changement d'avis, refus de participer ou de s'inscrire

  • subir : supporter une chose pénible contre son gré

  • une clique : un groupe de personne ayant des points communs, appartement au même milieu

  • BCBG : Bon Chic Bon Genre , expression qui désigne un groupe de personne dont le style vestimentaire s'apparente à la classe sociale bourgeoise

Transcription

J’ai toujours eu un faible pour les blonds aux yeux bleus.

Le tout premier s’appelait Julien. Julien Carreau. Comme les carrés d’une vitre. Quand on mentionnait son nom, je voyais très clairement dans mon esprit les carreaux d’une fenêtre. J’en voyais quatre, à vrai dire. C’était une fenêtre blanche avec une vitre transparente, mais on voyait pas à travers bizarrement. Ce qu’on distinguait surtout, c’était la bordure toute lisse et blanche immaculée qui encadrait chacun des carreaux. Si Julien était l’un de ces carreaux, alors qui étaient les trois autres ?

Bienvenue dans le podcast : La Vie d'Alix

Bon, commençons par Julien, le premier carreau qui a piqué mon cœur. On avait 6 ans. Il avait les cheveux très blonds, les yeux bleus clairs, un visage d’ange. Il était tout le temps le 2e de la classe. La première c’était moi. Yavait une forme de concurrence amicale entre nous. J’aimais bien la manière qu’il avait de dire : « Ah si seulement je pouvais être meilleur que toi. Je me sentais importante à ses yeux. Et comme ses yeux étaient beaux, c’était extrêmement plaisant. Non seulement je le trouvais mignon mais il était aussi très gentil. C’était l’un des seuls garçons à être gentil, beau et intelligent. Toutes ses qualités réunies. Presque toutes les filles de la classe adoraient Julien, et parmi ses admiratrices, j’étais la seule qui disait rien. Trop timide à l’époque. On était dans la même classe en CP, en CE1, CE2, CM1, CM2. Après ça c’est la fin de l’école primaire, et le début du collège. Les parents choisissent, et en général, on va tous dans des collèges différents. Les parents de Julien avaient choisi de le mettre au collège Saint Augustin. Moi, je devais entrer au collège St Martin. En France, l’éducation est gratuite, c’est un principe de base. Mais le problème c’est que les établissements scolaires publics sont réservés aux enfants qui habitent les quartiers situés dans la zone géographique bien délimitée où se trouve leur établissement. C’est comme ça dans les écoles primaires aussi, et dans les lycées. Pour tout le système. Ce qu’est pas juste c’est que certains bahuts sont dans les beaux quartiers, avec des familles plus aisées, plus éduquées, donc favorisées, et d’autres, dans les banlieues populaires où le niveau moyen des élèves est beaucoup plus bas. Les professeurs inexpérimentés sont envoyés dans ces collèges où personne ne veut aller, parce que c’est plus difficile, ya non seulement un niveau plus faible mais aussi des questions sociales à gérer. C’est fatigant quoi, et c’est peu dire. Les profs font de leur mieux pour relever les défis auxquels ils font face, mais parfois ils craquent, se mettent en arrêt, et c’est le début du défilé des suppléants, quand yen a. Parfois, les élèves se retrouvent sans prof de maths, ou sans prof de français pendant des mois. Du coup, certains parents sont prêts à payer pour faire entrer leur enfant dans un collège privé. Pour vous donner une idée, ya qu’a regarder les résultats du brevet, l’examen qu’on passait à la fin du collège. A Saint Martin, on avait même pas besoin d’aller voir les résultats parce que yavait 100% de réussite. L’établissement publique le plus réputé dans ma ville c’était David, et pour être accepté fallait soit faire partie du quartier, soit avoir un atout particulier. Genre, être musicien. Mes parents pensaient me mettre à Saint Augustin, au même endroit que Julien, et j’étais trop contente. Mais c i zen savaient rien. Mais ils ne m’ont pas inscrite tout de suite, parce qu’ils préféraient que je sois à David. Après avoir tout essayé, dérogation et tout le tralala, au bout de plusieurs mois, ils se sont rendus à l’évidence que c’était impossible d’obtenir mon inscription à David, et à mon grand dame, yavait plus de place à Saint Augustin. C’était trop tard. J’ai été acceptée dans le seul lycée privé, où par miracle, et surtout grâce à un désistement, il restait une place. Je suis rentrée à Saint Martin. Et je n’ai jamais revu Julien. Au moment où je vous parle, dans ma tête, il a toujours sa tête de petit garçon de 10 ans et demi. Ma sœur Miroir, qui avait à peine deux ans de plus que moi, a subit Saint Martin et toute sa clique pendant 5 ans. Au cas où vous n’auriez pas écouté les épisodes précédents, Saint Martin était le collège le plus stricte de la ville. Et puis yavait surtout des gens du style bourgeois, voire BCBG là-bas. Ça collait pas avec le style de Miroir. Elle en a eu marre et elle a changé de lycée. Et puis là, un jour, je sais pas par quelle coïncidence, elle s’est retrouvée dans la classe de Julien. Le fameux Julien. Ce jour-là, ça c’est Miroir qui me l’a raconté : Elle et Julien sont en cours ensemble. Julien reconnait Miroir. Pendant l’intercours, il s’approche d’elle pour discuter. Il lui fait : Eh salut, ta sœur était avec moi en primaire. Elle lui dit : Ouai, je sais. Et alors, tu pensais quoi d’elle ? Voici ce qu’il a répondu : Parmi toutes les filles de la classe, c’était elle ma préférée parce que c’est la seule qu’était pas amoureuse de moi.

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